Vilain propriétaire, gentil locataire.

(Billet sarcastique sur une histoire vécue de l’auteur)

Oyé brave gens la complainte du nanti :

Il était une fois un travailleur « François » qui souhaitait émigrer pour gagner sa vie. Attiré par l’appât du gain facile, il décida de louer sa masure…
 

Une gente Dame se présenta rapidement très intéressée par le logis : la surface, le prix, le matériel laissé sur place (le vilain mercenaire besogneux émigrait léger, et laissait en place l’essentiel de ses affaires, d’autant plus qu’il ne pouvait savoir combien de temps le pays d’accueil supporterait sa présence). « Avec moi point de problèmes », confirma la future « Châtelaine », l’essentiel de la Dime sera payé par la Confraternité d’Aide à la Fraude La CAF (Le vil usurier candidat à l’exil aurait dû se méfier !). Point de soucis donc, hormis l’arrivée d’un manant conjoint et de… quatre enfants.

Hélas ! Les problèmes arrivèrent très vite, moins de deux mois après l’installation de toute la famille dans le joli cottage…
 

D’abord, les évacuations furent bouchées une fois, deux fois, trois fois (graisse et lingettes : imparable en saison froide…). La solution résida dans le fait de détruire le collecteur extérieur pour le remplacer par un collecteur de 200 mm (2 fois plus large que le précédent !) et avec une pente à 45° pour le relier au « tout à l’égout », s’apparentant à…. Un vide-ordure (un mâchicoulis… quoi !) …

Puis les phases d’inondations se succédèrent (cinq en moins de deux ans ! les hautes eaux) : ballon d’eau chaude qui se fissure, débordement de siphons dû aux cheveux et autres poils non ramassés, infiltration dans les murs par les rosaces d’arrivée d’eau (certains ados ne coupant pas l’eau pendant leurs ablutions, mais coinçant la paume de douche derrière l’arrivée des tuyaux contre le carrelage) … Le plus drôle (ah ! ah ! je rigole !!!), étant que les experts (payés par le méchant propriétaire) venant faire les recherches de fuite n’en trouvaient pas, puisque les fuites n’étaient dues qu’à de mauvaises utilisations des installations. La solution cette fois, consista à refaire la salle de bain genre « hôtel Formule 1 », bien étanche… Un Lavomatic !!
 

Cette (pas divine) comédie dura 6 ans…. Chacun sait comme il est facile en France de se débarrasser d’un locataire indélicat… L’huissier qui viendra constater l’état du désastre (malgré les réparations successives faites par le méchant propriétaire), le jour du rendu des clés dira à l’exploiteur « Estimez-vous heureux ; ils sont partis ! »…

Mais le mieux dans cette drôlesse d’affaire, fut le comportement de la puissance publique. 

Voici l’attitude de la CAF lorsque les impayés de loyer (ah, oui ! en plus des dégâts, la quote-part des loyers, dus par le gentil locataire, n’était pas réglée !) lui furent contés :

Le propriétaire apprend qu’il doit proposer un plan d’apurement de la dette qui doit être approuvé, signé et envoyé par le locataire (oui la confiance règne vis-à-vis des propriétaires à la CAF). Le bon locataire donne son accord, et confirme qu’il enverra le plan d’apurement… Mais la transmission par pigeon voyageur du débiteur était une menterie et, trois mois plus tard, un courrier de la CAF annonce au méchant bailleur que si le document ne leur est pas transmis, la part payée directement au propriétaire sera supprimée. Stupeur et corne-bidouille ! D’autant que, si la CAF règle une partie du loyer de ce locataire directement, c’est que celui-ci est surendetté et dans l’incapacité de payer ce qu’il doit ! Lorsque le vil créancier contacte le Grand Organisme pour comprendre l’erreur qu’il aurait commise, celui-ci lui rétorque que les problèmes des propriétaires ne le concernent pas… Quel dommage !
 

Et voici, ici narré, l’odyssée de l’assistante sociale (Sainte Thérèse des Pauvres !)

Cette dernière envoie à l’indélicat bailleur qui réclame son dû, un très sympathique courrier : « En cas de procès, ce sera en votre défaveur pour ne pas avoir proposé un échelonnement de la dette » écrit-elle ! Le bailleur mécréant a essayé de la joindre, pour lui confirmer que ce n’était point sa faute. Elle n’en a pas fait autant. Elle aurait du se renseigner car il possédait toutes les preuves qu’il n’était en rien dans la rétention de documents soit disant utiles aux gentils locataires….
 
Finalement, dans ce type d’aventure exaltante, le propriétaire est toujours le grand gagnant : Les réparations, le mobilier détruit et (ou) dérobé, les loyers impayés, sans oublier les frais d’huissier et de procès, sont à sa charge. Près de 20 000 euros de perte sèche pour le méchant capitaliste propriétaire, sans compter le temps perdu et les quelques contrariétés subies (insultes, menaces) …
 

Pour le malheureux débiteur, c’est l’aide juridique et l’assistance sociale. Il ne paiera jamais rien, même s’il a déjà été condamné pour avoir escroqué son précédent propriétaire (c’est le cas ! Bien sûr !). Heureusement, ces pauvres locataires ont pu emmener les articles « empruntés » au propriétaire grâce à un camion de déménagement fourni (peut être par l’assistante sociale ?) et leurs trois véhicules dont un monospace passablement récent.

Ah oui, j’oubliais : ayant récupéré le logement détruit, le vilain propriétaire reçu, quelque temps plus tard, deux ou trois courriers d’un Casino de jeu de la région qui déplorait de ne plus voir les fameux gentils locataires (et les deniers des aides sociales) …

Epilogue
 

Peu avant le départ définitif des locataires, Une société HLM de la région a téléphoné au méchant propriétaire en question, afin de le questionner sur la solvabilité de ses locataires. Celui-ci n’a pas répondu. (Il semble en effet interdit de donner ce genre de renseignements). De plus, s’il confirmait qu’il avait eu des problèmes, les nouveaux (heureux) bailleurs se rétracteraient et il risquait de voir ces locataires maudits s’éterniser chez lui…

Quinze jours après le départ des bienheureux locataires, notre mutin propriétaire a joint le numéro de téléphone de la personne des HLM qui l’avait contactée, pour savoir si ses anciens locataires s’étaient installés là-bas. Il est tombé sur une personne qui, prenant la chose de haut, rétorqua qu’elle n’avait pas à communiquer sur la présence dans leurs locaux de telle ou telle personne. Notre vil propriétaire répondit que c’était eux qui avaient posé des questions indélicates en premier et qu’il souhaitait juste confirmer que, effectivement, ces locataires étaient des fléaux (Attila, en vieux français) …
 

Du coup, l’interlocutrice est allée voir le nom des nouveaux arrivés sur ses registres, en laissant le téléphone en fonction. La dernière phrase que le propriétaire a entendue, avant de raccrocher en riant, fut : « Merde ! Ils sont chez nous ! »

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